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PSYCHOTHÉRAPIE : «ÉVITER TOUTE DÉCISION RADICALE PR...

PSYCHOTHÉRAPIE : «ÉVITER TOUTE DÉCISION RADICALE PRÉCIPITÉE» (Alain Gérard)



PSYCHOTHÉRAPIE :
«ÉVITER TOUTE DÉCISION RADICALE PRÉCIPITÉE»
(Alain Gérard)

Alain Gérard, psychiatre et auteur de Dépression. La maladie du siècle (Éditions Albin Michel), évoque les effets d'une psychothérapie sur l'entourage du patient.

LE FIGARO. - Comment vos patients gèrent-ils l'annonce de leur psychothérapie ou analyse à leur entourage? 

Dr Alain GÉRARD. - Nous rencontrons tous les cas de figure. Il y a ceux qui font cette démarche personnelle en secret, car ils craignent de déclencher l'opposition de leur famille. Ceux qui informent leurs proches mais n'en parlent surtout pas dans leur milieu professionnel, par crainte de faire connaître leur fragilité. Dans certains environnements, on comprend qu'une personne dépressive aille marcher deux fois par semaine pour se maintenir à flot, mais suivre une psychothérapie reste parfois encore source de honte. Enfin, il y a ceux qui sont dans un autre excès: ils se vantent, deviennent prosélytes. C'est une manifestation du transfert qu'ils vivent avec leur psychothérapeute.

Et de votre côté, comment percevez-vous cet entourage dont vos patients vous parlent ?

Dr Alain GÉRARD. - Lorsque nous sommes engagés dans une psychothérapie de type analytique, le thérapeute n'a aucune interaction avec les proches de son patient. Et il sait qu'il travaille sur une matière «fantasmée». Les personnes décrites le sont à travers ce que le patient imagine, c'est là-dessus qu'il convient de travailler. Ainsi, si la personne ne cesse de parler de son «odieuse mère», nous nous demandons pourquoi il la voit comme cela et c'est une piste d'exploration. Rencontrer la vraie mère ne servirait pas. Dans le cas d'une thérapie avec des adolescents, sujets hypersensibles, il est fondamental d'être transparent. Il faudra leur dire «j'ai eu un appel de vos parents» si cela se présente et leur en délivrer la teneur. Enfin, lorsque nous sommes dans le cadre de la psychiatrie, avec des patients malades, il devient parfois impératif de communiquer avec leurs proches pour savoir comment leur état évolue et si une hospitalisation ne s'impose pas. Ainsi, plus nous sommes dans un registre psychiatrique, plus le lien avec l'entourage s'avère nécessaire.

Quels changements fréquents dans la famille sont provoqués par la psychothérapie d'un de ses membres?

Dr Alain GÉRARD. - Le groupe entier est fortement concerné, notamment parce que, parfois, ce n'est pas le plus malade de ses membres qui vient consulter! Dans les familles dysfonctionnelles, le patient échappe peu à peu à la place qu'on lui assignait, ce qui modifie le pseudo-équilibre installé jusque-là. Chacun s'en trouve déstabilisé, bien évidemment davantage si la personne en traitement vit au quotidien avec les autres, moins s'il est déjà autonome. Le rôle de la verbalisation change fortement aussi: le droit de dire que le patient expérimente en thérapie, et dont il observe qu'il n'est pas forcément destructeur, se déploie peu à peu dans la relation avec les proches. En revanche, les passages à l'acte sont à déconseiller.

C'est-à-dire?

Dr Alain GÉRARD. - On devrait toujours, au début d'une psychanalyse, en rappeler une règle d'or: ne pas provoquer de grands changements tant que l'on est engagé dans ce processus. Divorce, déménagement, démission… sont à éviter avant la fin de la thérapie, car il faut d'abord que le patient «fasse le travail». Je remarque qu'à notre époque d'accélération généralisée, certains prennent des décisions drastiques pour eux et leur entourage quelques semaines ou mois seulement après le début de la prise en charge. Cela peut vraiment s'avérer destructeur.

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