QUAND DES PSYS GOOGLISENT SUR LEURS PATIENTS... UN GESTE INCESTUEUX?
par Victor DELATOUR
On peut trouver beaucoup d’informations sur la page personnelle, le blog, la page Facebook ou Myspace de quelqu’un. Voir l’étendue de son réseau d’amis, comprendre ses goûts, son mode de vie, et son humeur du moment. Une pratique s’est donc répandue aux Etats-Unis chez certains psychiatres: le PTG, ou Patient-Targeted Googling. Cela consiste à glaner le maximum d’informations en ligne à propos d’un patient. Certains justifient cette pratique par le fait qu’ils peuvent y trouver des informations omises par son client: ses penchants suicidaires qu’il pourrait évoquer sur son blog, des activités ou relations qui pourraient avoir une influence sur son comportement, voire toutes sortes d’autres données sur sa famille, son passé, etc. Evidemment, cela pose des questions éthiques. Certes, le psychiatre n’a qu’une vue partielle sur ce que le patient lui raconte durant en tête-à-tête, et il peut être bon d’avoir un autre regard sur lui. Mais le «googling» peut aussi être utilisé à d’autres fins, moins nobles. Un étudiant qui avait négocié un tarif pour ses séances de psy, au motif qu’il avait des revenus limités, s’est vu reprocher par son psychiatre de lui mentir. Ce dernier était allé sur Facebook et y avait repéré une photo de la belle maison, située dans le quartier de luxe où habitait l’étudiant...
Brian K Clinton et al. (2010). Patient-Targeted Googling: The Ethics of Searching Online for Patient Information. Harvard Review of Psychiatry, 18
Commentaire: Les psy qui cherchent des infos sur Google ! Maryse Filion
Cette pratique devrait être dénoncée et les psy qui les utilisent tout simplement radiés. Les psy croient-il devoir tout savoir sur leurs clients ? Si le client décide d'omettre une information, il en a le droit. C'est un abus de pouvoir terrible et du voyeuriste à la limite alors qu'une relation d'aide doit être tout d'abord basée sur la confiance et la communication et le respect des limites de chacun. Le psy n'est pas là pour déceler les mensonges ou la vérité, ou pour tout connaître. S'il a des questions de précision (utile pour son travail) et non de curiosité, qu'il les pose. Et s'il a des doutes et bien peut-être est-ce lui qui a un problème en relation. Peut-il faire un bon travail ? Je suis intervenante depuis presque trente ans et je crois que les gens peuvent nous cacher des choses et c'est bien ainsi. Je remets ma pratique en cause et les professionnels aussi car justement je pense qu'ils sont devenus prétentieux et qu'ils ne reconnaissent plus les limites de leurs pratiques et qu'ils banalisent le pouvoir de leur influence et de leur impact. Quelle trahison pour un client de voir son psy regarder son Facebook, incestueux ce geste. !!!
* Article et commentaire publiés le 28 avril 2010 in Sciences humaines. http://le-cercle-psy.scienceshumaines.com/quand-des-psys-googlisent-sur-leurs-patients--238230_sh_25447
PDF de l'article: http://www.psyvig.com//doc/doc_175.pdf
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